J’habite dans un quartier qui se gentrifie gentiment. En fait non, il n’y a rien de gentil là-dedans, c’est même plutôt violent. Il n’y a qu’à regarder la progression des prix de l’immobilier pour se rendre compte que gentil n’a qu’un œil.
Un des signes de cette gentrification, c’est la multiplication du nombre de cafés et de restaurants qui ont ouvert récemment dans le voisinage. Rien que ce mois-ci deux cafés ont ouvert dans la même rue. La concurrence va être rude puisqu’il existe déjà d’autres cafés installés depuis longue date.
L’ouverture d’un nouveau café dans un quartier est toujours un petit évènement. On en discute sur le groupe Facebook des Amis du Quartier. Et les discussions sont souvent bien animées. Il y a quelques jours l’une d’entre elles a retenu mon attention. Un membre du groupe avait posté la photo d’un panneau qu’un des cafés du quartier avait posé juste devant sa terrasse le matin même.
On pouvait lire:
I know what you said about us on “Les Amis” du Quartier
Il faut quand même avoir des cojones pour poster ça devant son business. Un peu comme se tirer une balle dans le pied ou encourager son chien à faire pipi sur son tapis en poil de dromadaire rapporté à grands frais de Kairouan.
On notera les guillemets pour amis et on imagine le geste fait avec les deux mains pour mimer la ponctuation par la personne qui a pris la peine d’écrire ces mots.
Amis, mon cul.
Il faut dire que le café en question il n’a pas bonne presse sur le groupe des Amis du Quartier. Disons qu’il n’a pas très bonne réputation auprès des personnes qui ont le temps d’avoir des discussions animées et interminables sur les groupes Facebook. Et qui sont ces personnes qui ont le temps de s’exciter pour un oui ou pour un non à toute heure du jour et de la nuit? Hein, qui sont-elles? Les mamans de bébés et d’enfants qui ont l’âge d’être en poussette, pardi!
Le nœud du problème c’est que Le Café Mona n’aime pas trop les armées de mamans qui déboulent avec leurs poussettes et leurs bambins excités qui courent dans tous les sens ou qui circulent en trottinette dans le café. Et ils le font savoir. Félix, le patron du Café Mona a une opinion tranchée sur pas mal de sujets. J’ai l’impression que les fées qui se sont penchées sur son berceau ont oublié, les sottes, de lui souffler le don de la sociabilité. Il possède un deuxième café dans le coin et sur les murs il est clairement marqué qu’il n’y a pas de place pour les poussettes dans son établissement. Et qu’il vaut mieux que les enfants aillent se dégourdir les jambes dans le parc de l’autre côté de la rue.
Mais il est aussi inscrit près de la caisse que si on est en train de parler au téléphone, le barista ne vous servira pas. Il est comme ça Félix, sans filtre. Comme il n’est pas très populaire auprès de la “pram brigade” – la brigade ou le gang des poussettes – je m’étais dit que ça pouvait être un endroit sympa pour venir travailler. Pas d’enfants donc pas de bruit et par conséquent idéal pour la concentration et le flux de mes bonnes idées. Mais le boss, s’il n’aime pas qu’on discute au téléphone pendant qu’on commande son café, il n’aime pas non plus internet. “I don’t believe in Internet” qu’il m’a dit. T’y crois toi? Il préfère que les gens lisent des livres en papier, d’où le nom de son deuxième établissement, Le Livre de Poche. Il souhaiterait également que les gens sortent de leur petite bulle et qu’ils se parlent en vrai… et pas sur Facebook (suivez son regard). Utopique le gars. On lui rappelle qu’on est à Londres?
La fameuse discussion sur Facebook a suscité 160 commentaires et 415 likes et Félix, celui n’aime ni les enfants, ni le decaf et ni le lait de soja est habillé jusqu’à l’hiver 2017. Au moins.
Aujourd’hui La Clé des champs a ouvert ses portes. L’ouverture de ce tout nouveau café était attendue depuis un petit moment car elle avait été annoncée de longue date sur Twitter, Facebook et sur la devanture. Un nouveau terrain de jeu pour le gang des poussettes. J’y suis allée ce midi. Je te raconterai ça une autre fois. Epique.
* Les noms sont purement fictifs, mais les faits sont réels
Catégories :Humeur
Excellent ! 🙂
Hallucinant! J’ai l’impression que les populations ont du mal à vivre ensemble, une sorte de communautarisme sans communauté. Et personne n’a raison. l’avenir réside-t-il dans les espaces réservés et spécialisés?
Il est très doué pour faire du commerce, ton Félix! C’est sur qu’insulter la clientèle. Ça paie toujours!
Felix est un peu too much certes mais il faut avouer que le « gang des poussettes » peut être un peu pénible par moment et il devient difficile de trouver un café, starbucks ou autre, un peu calme. Par contre, il en tient une sacré couche le Felix avec son « je ne crois pas en Internet »! On ne me l’avait jamais faite celle-ci lol
Un peu pénible? Oh le doux euphémisme…
excellent j’adore ces petits messages qui te font bien la morale haha 😀
Morte de rire… Je comprends que parfois les gamins qui braillent ou qui courent dans tous les sens ca puisse taper sur le systeme mais sans les prams’gangs il y aurait moins de cafe moins de choix moins de fun …Et on ne serait plus a Londres mais a Paris…
Ayant depuis peu quitte le gang je dois avouer que ca faisait du bien de sortir en poussette sans avoir trop honte juste un peu quand il arrivait a poulette de faire des siennes.
Il faut dire pour ma defense que je suis assez peu sensible aux nuisances sonores ca aide grandement!
Et bien dis, on ne pourra pas dire qu il n y a pas d ambiance par chez toi!!
Tant que ça reste soft, ce genre de petites guéguerres c est assez rigolo pour changer de la routine je trouve.
Et encore merci pour ton blog si rafraichissant qui me fait rire à casi chaque post.
Eh eh, merci Audrey.
Eh bien moi je trouve qu’il a parfaitement raison Félix. Il est chez lui et le gang des poussettes n’a pas tous les droits, et surtout pas celui d’enquiquiner impunément le monde. Vivre ensemble ne veut pas dire que population A fait ce qu’elle veut et population B n’a qu’à s’écraser.
Ces règles ont probablement été instaurées pour une bonne raison (peut-être que les employés en ont marre de devoir constamment éviter des gamins qui courent partout et des poussettes bloquant le chemin, tout en portant des plateaux de boissons brûlantes ? Va savoir.)
De plus, bavarder au téléphone en payant à la caisse est le summum de l’impolitesse et du mépris de l’employé, Bravo aux patrons qui comprennent cela et agissent en conséquence. Non, le client n’a pas tous les droits.
Pour l’interdiction d’internet, ma foi personne n’est obligé de fréquenter son établissement. S’il préfère avoir moins de clients mais une meilleure ambiance (de son point de vue), c’est son droit le plus strict.
Sinon,le vrai nom de Félix, c’est Bernard Black, non ? Hein ? Je suis sûre que j’ai bon.
Hello Caroline,
Je suis parfaitement d’accord avec toi.
Oui tout à fait, comme Bernard Black 😉
Ah la vache! oooouuuuh mon doux rêve dans lequel tous les cafés londoniens sont parfaaaaits
Le redoutable gang des poussettes dans certains quartiers de Londres fait des ravages.